Repéré en 2009 dans la version portugaise du télé-crochet «American Idol», l’équivalent de la «Nouvelle Star», comme sa soeur Luisa quelques années auparavant, Salvador Sobral a poursuivi son parcours de chanteur mélancolique et au grand coeur jusqu’au triomphe à l’Eurovision.
Il chante avec le coeur mais paradoxalement, Salvador Sobral était encore, il y a quelques semaines, un parfait inconnu en attente d’une greffe de coeur. Samedi à Kiev, l’artiste portugais de 27 ans a offert à son pays son premier sacre à l’Eurovision grâce au charme d’une voix de crooner épurée de tout artifice.
Sa chanson intimiste et mélancolique «Amar Pelos Dois» (aimer pour deux), composé par sa soeur aînée Luisa Sobral, chanteuse à succès, a conquis le public.
Sans chorégraphie envoûtante ni tempo dansant, sa performance exécutée en portugais plutôt qu’en anglais, fait rare à l’Eurovision, ne présentait pas au premier abord les meilleurs atouts pour séduire sur la scène télévisuelle de Kiev.
Derrière sa barbe clairsemée et son catogan, le jeune homme issu de la bourgeoisie lisboète cache une certaine fragilité, symbolisée par une voix fluette couplée à une sévère insuffisance cardiaque ne l’éloignant jamais plus de deux semaines de ses médecins.
En attente d’une greffe du coeur
«Ma maladie, même si on ne peut pas la guérir totalement, c’est un petit problème en vérité, certainement le seul que j’ai dans ma vie», dédramatisait avant son départ pour l’Ukraine le chanteur, toujours en attente d’une greffe de coeur, le sien étant trop gros pour son corps.
Pour des raisons de santé, il n’avait exceptionnellement pas pris part en début de semaine aux répétitions organisées au centre d’exposition international de Kiev, laissant la place à sa soeur.
Salvador Sobral se veut également un chanteur engagé comme en témoigne le pull qu’il arborait mardi dernier, après sa demi-finale, en soutien aux réfugiés : «Quand j’ai su que j’allais participer à l’Eurovision j’ai tout de suite pensé à eux, parce qu’ils quittent leur pays pour échapper à la mort. Ces personnes ne sont pas de simples immigrés», déclarait le crooner.
La chanson par passion
Salvador Sobral a toujours baigné dans un univers musical, chantant avec ses parents les grands tubes des Beatles, de John Lennon, de Simon et Garfunkel ou encore de Genesis. A l’âge de dix ans il fait une première apparition à la télévision et remporte son premier concours.
Cette même passion se poursuit, avec un grand saut à l’âge de 19 ans, en 2009, dans la version portugaise du télé-crochet «American Idol» où il avait terminé à la 7e place.
Tout juste majeur, il avait cependant très mal vécu son exposition médiatique et s’est arrêté de chanter peu après sa sortie de l’émission. A partir de là, il quitte le Portugal pour les Baléares, et un Erasmus de psychologie. Sur les îles espagnoles, il plonge dans la drogue et consomme régulièrement des champignons hallucinogènes.
Peu à peu, il remonte la pente et commence à se produire dans les bars et hôtels de Majorque. Un très long apprentissage de la chanson avant de rejoindre Barcelone afin d’y étudier le jazz et parfaire sa voix.
C’est dans la cité catalane qu’il découvre les compositions du trompettiste et chanteur au timbre particulier Chet Baker, aujourd’hui sa plus grande inspiration musicale tout comme le chanteur et compositeur brésilien Dorival Caymmi.
Son émotion fait chavirer les coeurs
Sa personnalité hors normes et son émotion à fleur de peau auront fait chavirer les coeurs et permis au Portugal de profiter d’une consécration attendue depuis sa première participation à l’Eurovision en 1964. «Je n’aime pas les musiques -fast-food- sans but, mes morceaux doivent avoir un sens, je chante avec mon coeur» a toujours martelé Salvador Sobral.
Après avoir composé un premier album en 2016 intitulé «Excuse Me», le chanteur n’entend pas perdre la tête après ce succès à l’Eurovision comme il l’explique au Diario de Noticias : «Cette victoire est très divertissante mais je ne suis pas un héros national. Demain personne ne se souviendra de ce succès.
Je vais composer mon deuxième album et c’est ce travail qui me guide». L’intéressé ne cache pas qu’il aimerait toutefois faire un petit crochet en Amérique du Sud… (AFP – leparisien)