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Aux Açores la vie des pêcheurs de Rabo de Peixe n’est pas facile

ByTeam

Juil 21, 2015
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São Miguel - açoresSur l’île de Sao Miguel, aux Açores, l’esprit communautaire des pêcheurs de Rabo de Peixe perdure de père en fils, malgré leurs conditions de vie difficiles et une diminution des stocks de poisson.

« J’ai été élevé dans ce milieu et j’aime cette vie de malheur », lance avec fierté José Vieira, occupé à ranger ses filets avec son fils Paulo Miguel, qui vient de fêter son 12e anniversaire.

Propriétaire d’une petite embarcation traditionnelle, l’homme de 47 ans et ses sept marins, tous membres de sa famille, déchargent 700 kg de pagres, rascasses rouges, congres et murènes sur le plus important port de pêche de cet archipel portugais, situé en plein l’Atlantique nord.

La prise du jour est correcte mais ce pêcheur à l’air railleur et son équipage gagnent en moyenne moins de 400 euros par mois, comme la plupart de leurs compagnons de fortune dans cette bourgade de la côte nord de São Miguel, la plus grande des neuf îles que comptent les Açores.

« Cela va de mal en pis. Il y a trop de bateaux sur la mer, mais on ne peut pas s’arrêter de pêcher. On ira jusqu’au dernier poisson », assure avec son fort accent local José Vieira, torse nu, cigarette au coin de la bouche.

L’avenir de ses quatre enfants, dont le jeune Paulo Miguel, un petit garçon timide venu «donner un coup de main après l’école», lui semble donc tracé d’avance: « à la pêche au moins on évite de mourir de faim ».

100 euros par semaine

Aujourd’hui âgé de 16 ans, Ruben Oliveira, fils et frère de pêcheurs, a lui aussi commencé à travailler très tôt, dès ses 11 ans. «C’est une vie difficile. Si on gagne 100 euros par semaine c’est déjà bien», dit-il résigné, assis sur un cageot.

« La pêche est en crise depuis longtemps et les pêcheurs ont toujours été pauvres, mais il y a 20 ans on en vivait beaucoup mieux », résume le président de leur syndicat, Luis Carlos Brum.

D’après lui, la situation a commencé à s’aggraver il y a environ cinq ans avec les difficultés qu’a connues le secteur du bâtiment, seule alternative donnée aux travailleurs peu qualifiés, mais surtout en raison d’une surpêche qui menace d’épuiser les stocks de poisson.

Si l’archipel compte près d’un million de kilomètres carrés de surface maritime, la mer y est très profonde et les zones de pêche à la portée de sa flotte traditionnelle restent peu nombreuses.

«La pêche aux Açores reste essentiellement artisanale, elle n’a pas été modernisée pour devenir une activité économique viable», reconnaît Fausto Abreu, membre du gouvernement régional chargé des Affaires de la mer, défenseur d’une filière qui «pêche moins pour vendre mieux».

Ce responsable admet cependant qu’il n’est pas aisé de transformer la mentalité des pêcheurs de Rabo de Peixe (nom qui veut dire «queue de poisson» en portugais) pour les attirer vers d’autres activités, même liées à la mer, telles que la pisciculture et le tourisme maritime.

«C’est une communauté aux traditions très ancrées, où les fils de pêcheurs n’envisagent pas de faire autre chose. Cela ne serait pas un souci si cette culture n’était pas en proie à de graves problèmes d’abandon scolaire précoce, de maternités adolescentes et d’alcoolisme», explique M. Abreu.

« Les enfants ici grandissent en liberté et rêvent d’affronter les dangers de la mer comme leurs pères et on a du mal à leur expliquer qu’il faut aller à l’école le plus longtemps possible », poursuit-il.

Stigmatisée dans les médias comme étant la communauté la plus dépendante des prestations sociales versées par l’Etat, Rabo de Peixe et ses près de 10.000 habitants affichent un des taux de fécondité les plus élevés du Portugal, qui figure par ailleurs au dernier rang européen en la matière.

Si beaucoup d’enfants et d’adolescents aident leurs parents, ils sont également nombreux, désoeuvrés, à se baigner bruyamment dans le port de pêche ou à flâner dans les ruelles étroites du quartier des pêcheurs, composé de petites maisons juxtaposées aux couleurs vives et variées.

Matriarche d’une famille comptant neuf enfants et 15 petits-enfants, Maria Ferreira assume sa condition avec fatalisme: « je suis petite-fille, fille, épouse, mère et grand-mère de pêcheurs ».

« De mon temps, on n’avait pas toutes ces prestations sociales mais le travail de mon mari suffisait à nous nourrir. »
« Aujourd’hui, le poisson se fait rare et les prix baissent», regrette cette femme de 57 ans. «Si on avait un autre choix, je serais la première à abandonner cette vie. » (AFP)

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