Des milliers des personnes étaient rassemblées contre l’antisémitisme dimanche dans plusieurs grandes villes, avant la « marche civique » organisée dans l’après-midi à Paris, en présence d’une bonne partie de la classe politique française, mais sans le chef de l’Etat ni l’opposition de gauche radicale.
Les premiers rassemblements dans la matinée ont réuni 3.000 personnes à Lyon, autant à Nice, également quelques milliers à Strasbourg, autour d’un même mot d’ordre: « pour la République, contre l’antisémitisme ».
Un message qui figurera aussi sur la banderole en tête du cortège parisien, qui s’élancera à 15H00 de l’esplanade des Invalides, près de l’Assemblée nationale, en direction du jardin du Luxembourg, non loin du Sénat.
Une heure avant le départ, de nombreux drapeaux tricolores étaient déjà visibles dans la foule, avec très peu de pancartes.
Parcours symbolique décidé par les deux têtes du Parlement, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, à l’initiative de cette marche, qui se veut une réponse à l’explosion du nombre d’actes hostiles aux juifs depuis les massacres du Hamas en Israël le 7 octobre et la riposte militaire massive qui a suivi.
Une cause pour laquelle « tout le monde devrait se sentir concerné », a jugé sur Radio J le grand rabbin de France Haïm Korsia, regrettant que le sujet ait tourné au pugilat politique, « une honte » selon lui.
« Les postures n’ont pas leur place » dans cette manifestation, a mis en garde Elisabeth Borne dans un tweet dimanche matin, ciblant à la fois la gauche radicale de La France insoumise dont « l’absence parle d’elle-même », et l’extrême droite du Rassemblement national dont « la présence ne trompe personne ».
La Première ministre, dont le père de confession juive a été déporté, défilera au premier rang du cortège parisien, dans un carré de tête réunissant des personnalités « incarnant » la République, comme les ex-présidents François Hollande et Nicolas Sarkozy et d’anciens chefs de gouvernement, mais « pas de chefs de parti ».
Environ 25 ministres devraient également manifester dimanche à Paris et une dizaine en province, selon Matignon. Des célébrités comme la réalisatrice Danièle Thompson, le médecin Michel Cymes ou le footballeur Lilian Thuram ont aussi annoncé leur participation dans La Tribune Dimanche.
Macron absent
Emmanuel Macron, lui, n’y sera pas. Le président de la République s’est adressé aux Français samedi soir, par le biais d’une lettre publiée par le journal Le Parisien. Il y a déploré « l’insupportable résurgence d’un antisémitisme débridé ».
« Une France où nos concitoyens juifs ont peur n’est pas la France », a-t-il écrit, en lançant un appel à l’unité de la France « derrière ses valeurs, son universalisme ».
Mais cette marche parisienne et les manifestations organisées en province sont loin de refléter une union nationale. Leur préparation a donné lieu à une féroce bataille politique sur la présence dans le défilé du Rassemblement national (RN) et de l’autre parti d’extrême droite Reconquête!.
La participation du RN de Marine Le Pen, « un parti politique créé par les héritiers de Vichy », ce n’est « pas de l’unité mais de l’indécence », a ainsi jugé le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, dans Le Parisien.
« Est-ce si difficile de faire une pause devant le sujet qui doit nous réunir? », a répliqué Marine Le Pen, dans un entretien au Journal du dimanche où elle affirme qu’il « ne peut exister en matière d’antisémitisme aucune ambiguïté ». Expression jugée sincère par l’ex-président Nicolas Sarkozy, qui « prête a priori un engagement de bonne foi » à la cheffe de file des députés RN.
« Fauteurs de haine »
A l’inverse, la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, accusé d’ambivalences sur l’antisémitisme, boycotte la manifestation du fait de la présence du RN, même si des Insoumis devraient se ranger derrière d’autres initiatives dimanche, à Paris ou en province.
Dans la capitale, le dépôt de gerbe organisé par le parti de gauche radicale près de l’emplacement de l’ancien Vel d’Hiv a été perturbé par un groupe de contre-manifestants arborant des pancartes « Touche pas à la mémoire », aux cris de « collabos ». L’oeuvre d' »une dizaine d’excités », a réagi la cheffe des députés LFI, Mathilde Panot.
Dans ce climat tendu, un important dispositif de sécurité sera déployé avec « plus de 3.000 policiers et gendarmes » ainsi que « des unités d’élite mobilisées », selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Les partis de gauche Europe Ecologie-Les Verts, PS et PCF ainsi que des associations de défense des droits humains et des organisations de jeunesse défileront derrière une banderole commune « contre l’antisémitisme et tous les fauteurs de haine et de racisme » dans une démarche de « cordon républicain » face à l’extrême droite.
La manifestation devrait être silencieuse. Aucune prise de parole n’est prévue dans le cortège.
De nombreux représentants des cultes seront aussi présents, mais peu de responsables musulmans. Plusieurs organisations ont en effet déploré que l’appel à manifester ne comporte « pas un mot sur l’islamophobie » et pointé « les amalgames » entre islam et antisémitisme.
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