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Les vies brisées des petits épargnants de Banco Espirito Santo

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Banco Espirito SantoAgriculteurs, retraités ou chômeurs, ils ont fait confiance à leur banque et investi l’épargne de toute une vie. Aujourd’hui, ses anciens clients de Banco Espirito Santo (BES), dont la chute a fait trembler le secteur financier portugais, risquent de tout perdre.

Battue par les vents, la plantation de laitues d’Albino Gomes, à Silveira, une bourgade au nord de Lisbonne, tombe en décrépitude, faute d’argent. « Ma conseillère bancaire m’a assuré que c’était un placement sans risque, à rendement garanti. Maintenant, je n’ai quasiment plus rien », dit-il.

A leur insu, environ 5000 clients de BES ont troqué leur épargne contre des créances toxiques de Rioforte et Espirito Santo International, deux holdings luxembourgeoises du groupe Espirito Santo qui ont entre-temps fait faillite. En tout, ils ont placé plus de 500 millions d’euros.

Bâches plastiques déchirées, routes de terre défoncées, la parcelle agricole de deux hectares d’Albino Gomes manque d’argent frais pour semer des engrais. « Je ne dors plus, j’y pense en permanence », confie l’exploitant, 73 ans, la voix étranglée par l’émotion.

Pour entretenir ses serres, le maraîcher, qui n’a qu’une maigre retraite de 410 euros par mois, a besoin d’un emprunt. Ironie du sort, il compte faire la requête auprès de Novo Banco, né des décombres de Banco Espirito Santo.

L’histoire commence le 3 août, le jour où l’Etat portugais sauve de la faillite Banco Espirito Santo, en y injectant 3,9 milliards d’euros, montant auquel les banques ajoutent un milliard. Les actifs jugés sains sont regroupés au sein de Novo Banco.

Des Placements à haut risque

Les petits porteurs sont les premiers à se voir appliquer le nouveau système de sauvetage des banques adopté par l’Union européenne. Idée principale: faire payer les actionnaires et créanciers non prioritaires, pour éviter aux contribuables de mettre la main à la poche.

Ils ont tous investi entre 50.000 et 100.000 euros, parfois plus, à des taux d’intérêt oscillant entre 3 et 4%. Le placement d’Albino Gomes est arrivé à échéance le 31 octobre. Depuis, pas de nouvelles. Son extrait de compte bancaire reste désespérément vide, tout a été remis à zéro.

La garantie de remboursement par l’Etat de 100.000 euros, valable pour des comptes bancaires en Europe, ne joue pas dans son cas, car il a investi dans un produit financier à haut risque.

Inquiète, la Banque du Portugal avait obligé BES l’an dernier à inscrire dans ses comptes une provision de 1,25 milliard d’euros pour protéger les petits détenteurs de titres. Mais aujourd’hui, elle assure que cette réserve « ne constitue pas une garantie de remboursement ».

Si Novo Banco s’était dans un premier temps engagé à racheter les mauvaises créances, son patron Eduardo Stock da Cunha botte désormais en touche. « Il ne revient pas à Novo Banco de payer », mais « on travaille à une solution ».

Les Cobayes des règles européennes

Ce changement de ton brutal a plongé dans le désespoir des milliers d’épargnants: « l’angoisse est très forte, ils survivent à coup d’antidépresseurs. Leur bête noire, c’est leur conseiller qui les a dupés, et ils ne reculeront devant rien », assure Mario Gomes, fils de l’agriculteur de Silveira.

Il est vice-président de l’Association des clients lésés de BES, dont les membres envahissent régulièrement des agences de Novo Banco, aux cris de « voleurs! » et « rendez-nous notre argent! ».

La colère monte. Samedi, une centaine de manifestants ont assiégé la résidence du gouverneur de la Banque du Portugal, Carlos Costa, à Lisbonne, à leurs yeux le principal responsable de leur mésaventure.

Pour eux, il ne fait pas de doute que la Banque du Portugal a changé d’avis pour obtenir le prix fort pour Novo Banco, mis en vente pour rembourser l’Etat et les banques qui ont contribué à son sauvetage.

« Malheureusement, les ratios de capital d’une banque sont jugés plus importants que la détresse des êtres humains », déplore l’avocat Carlos Lucena du cabinet Telles qui représente plusieurs clients spoliés.

« Nous sommes les cobayes du nouveau système européen de sauvetage des banques. Le Portugal est un pays pauvre, ils nous méprisent », se désole Antonio Nunes, 68 ans, fonctionnaire à la retraite, client fidèle de BES pendant 45 ans. (AFP)

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