• 12 septembre 2024

UE: réforme de durcissement sur les renvois des migrants irréguliers

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Une réforme de l’asile sous le feu des critiques, durcissement sur les renvois des migrants irréguliers, contrôles accrus aux frontières extérieures, accélération des procédures: Bruxelles a dévoilé une réforme de l’asile, critiquée par les ONG qui l’accusent de céder aux pays les plus hostiles à l’accueil des réfugiés.

La présidente de la Commission Ursula von der Leyen a défendu un équilibre « juste et raisonnable » entre « responsabilité et solidarité » entre les 27. « Nous devons trouver des solutions pérennes sur la migration », a-t-elle plaidé, soulignant que l’incendie du camp grec de Moria était « un rappel brutal ».

Cinq ans après la crise de 2015, ce nouveau « Pacte européen sur la migration et l’asile » prévoit que les pays de l’UE qui ne veulent pas prendre des demandeurs d’asile en cas d’afflux devront en revanche participer au renvoi des déboutés du droit d’asile depuis le pays européen où ils sont arrivés vers leur Etat d’origine.

Une façon de mettre tous les Etats à contribution en contournant le refus persistant de plusieurs pays, notamment ceux du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) d’accueillir des migrants.

Bruxelles tire les leçons de l’échec des quotas de relocalisation décidés après 2015 en abandonnant le principe d’une répartition contraignante des migrants.

Très attendu et plusieurs fois repoussé, ce pacte prévoit de « rigoureux contrôles » aux frontières extérieures, de manière à écarter plus rapidement les migrants jugés peu susceptibles d’obtenir une protection internationale, dont le traitement sera accéléré, a affirmé le vice-président de la Commission Margaritis Schinas.

Dublin revisité

Surtout, le pacte révise la règle consistant à confier au premier pays d’entrée d’un migrant dans l’UE la responsabilité de traiter sa demande d’asile.

Ce « règlement Dublin », pilier actuel du système d’asile européen, n’a cessé d’alimenter les tensions entre les 27, en raison de la charge qu’il fait porter aux pays géographiquement en première ligne comme la Grèce et l’Italie.

Selon la proposition de la Commission, le pays responsable de la demande pourra être celui où un migrant a des liens familiaux, où il a travaillé ou étudié, ou alors le pays lui ayant délivré un visa.

Sinon, les pays de première arrivée resteront chargés de la demande et un Etat soumis à une « pression » migratoire pourra demander l’activation d’un « mécanisme de solidarité obligatoire ».

En cas de « crise » similaire à celle de 2015, lorsque plus d’un million de réfugiés avaient pris l’Europe de court, un Etat devra prendre en charge la relocalisation des réfugiés ou le renvoi des migrants déboutés. Et s’il échoue à renvoyer des migrants dans leur pays d’origine dans les huit mois, il doit les accueillir.

Des alternatives jugées irréalisables pour les petits pays, qui n’en ont pas les moyens, fait valoir une source européenne.

Du coup, l’UE veut augmenter les retours de migrants en « intensifiant les négociations » avec les Etats d’origine ou de transit. Seulement un tiers des migrants déboutés quittent effectivement l’UE.

La situation est très différente de 2015, le nombre d’arrivées irrégulières dans l’UE ayant chuté en 2019 à 140.000. Et si en 2015, 90 % des migrants ont eu le statut de réfugié, aujourd’hui les deux tiers n’ont pas droit à une protection internationale

« Honte institutionnalisée »
Un mécanisme de solidarité concernant les sauvetages en mer est aussi prévu par le nouveau pacte, qui propose d’épargner de poursuites judiciaires les ONG impliquées.

Si le constat d’un système européen grippé fait l’unanimité, le nouveau « pacte » suscitait des réactions très contrastées.

La Commission « a beaucoup bougé vers notre proposition », s’est félicité le ministre autrichien de l’Intérieur, Karl Nehammer.

C’est « un pas important » mais insuffisant vers une approche « vraiment européenne », a jugé le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte, réclamant « des certitudes » sur son application.

La Hongrie, elle, réaffirmait ses exigences: « Nous devons nous assurer que les frontières extérieures demeurent parfaitement étanches sur toute leur longueur », a réagi le porte-parole du gouvernement Zoltan Kovacs.

« Nous avons maintenant une grande possibilité de montrer au monde que sur ce thème difficile, l’Europe se serre les coudes », a réagi le ministre allemand de l’Intérieur, Horst Seehofer, dont le pays occupe actuellement la présidence de l’UE.

Experts, eurodéputés et ONG étaient en revanche très critiques. La Commission « rapièce un ensemble sans véritable patron, sans structure, sans ossature », indique à l’AFP le spécialiste des questions migratoires Yves Pascouau, tandis que le chercheur belge François Gemenne fustigeait « un compromis entre la lâcheté et la xénophobie ».

Pour l’ONG Oxfam, la Commission « s’incline devant les gouvernements anti-immigration ». « Ce nouveau pacte institutionnalise la honte (…) il n’empêchera pas le maintien de camps indignes. La Commission s’est couchée devant Orban et consorts », abonde l’eurodéputé Damien Carême (Verts).

« L’UE a externalisé sa politique migratoire à la Turquie et en a payé le prix géopolitique. Nous ne pouvons pas fonder nos politiques sur l’extrémisme hongrois et polonais, malheureusement c’est ce que fait la Commission », cinglait l’eurodéputé Guy Verhofstadt (Renew, centre).
(AFP)

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